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Va-t-on manquer de chocolat en 2050?

14 octobre 2020

Mes inquiétudes ont débuté en 2018 lorsqu’une amie m’a identifiée sur une publication Facebook. 

En gros, celle-ci annonçait que ma relation d’amour avec le chocolat avait une date d’expiration.  

Étant donné nos méthodes de production alimentaire actuelles, j’ai eu peur. Bin quoi, si on exploite le cacao comme on vide les océans (surpêche), il y a de quoi s’inquiéter! 

Pénurie de chocolat en 2050?
Source: Santé Canada (2019)

CE FUT UN JOUR SOMBRE DANS MA VIE. 

Plus sérieusement… 

Dans cet article, je vous partage le fruit de mes recherches sur le sujet, c’est-à-dire les réponses aux questions suivantes: 

  • Alors, c’est vrai qu’on va manquer de chocolat ?! 
  • Comment peut-on aider la situation en tant que consommateur? 

Mais avant de répondre à ces brûlantes questions, il importe de survoler quelques bases entourant la production de chocolat. 

Au fait, d’où vient le chocolat?

Le chocolat vient d’un arbre, le cacaoyer. Cet arbre produit des grosses cabosses dans lesquelles se trouvent des fèves de cacao. Plusieurs étapes telles que la torréfaction (griller les fèves pour en faire ressortir les arômes) et le broyage séparent ces fèves de la pâte de cacao. La pâte est ensuite transformée (p. ex. ajout de sucre) pour devenir le « incredible, amazing, show-stopping, spectacular » chocolat qu’on connait. 

Cabosse
Cabosse
Fèves de cacao_pixabay
Fèves de cacao

Le Ghana et la Côte d’Ivoire sont les deux plus grands producteurs de cacao au monde.  

Selon la Fondation mondiale du cacao, cette culture est assurée en majorité par de petites entreprises familiales qui vivent en situation de pauvreté et dont les enfants participent très jeunes aux travaux agricoles.  

Le Ghana et la Côte d'Ivoire en Afrique
Le Ghana et la Côte d'Ivoire sont situés en Afrique de l'Ouest

La production de cacao est également la cause de déforestation massive dans ces pays et, dans bien des plantations, le cacao est cultivé en monoculture par souci de productivité. Or, non seulement l’efficacité de cette méthode est contestée, mais elle comporte ses enjeux environnementaux. 

La monoculture, c’est quand on fait pousser un seul type de plants sur un vaste territoire (p. ex. un champ de maïs). Ce manque de diversité rend le territoire plus fragile à toutes sortes de problèmes: érosion et appauvrissement des sols, maladies, attaques par des insectes. Pas cool! 

Monoculture
Champ de maïs (monoculture)
Polyculture
Ton potager de rêve (polyculture)

Alors, c’est vrai qu’on va en manquer ?!

Pas forcément. Selon une recherche de l’Agence Science-Presse, la rumeur serait basée sur une projection alarmiste des conséquences des changements climatiques. Bien que le réchauffement planétaire nuise bel et bien aux cacaoyers, ces arbres risquent de s’adapter au fil des années.

C’est plutôt la forte demande des adeptes de chocolat combinée à la faible productivité de ces arbres qui menacent de propulser le cacao au rang des produits de luxe. 

On aime tellement ça, les réponses nuancées haha! C’est ça la science les amis! C’est rarement tout blanc ou tout noir. 

Le chocolat, so fabulous
Le chocolat, so fabulous

Des équipes de recherche font de gros efforts pour assurer la pérennité de la production cacaoyère. Agroforesterie et manipulation génétique font partie des stratégies envisagées. De plus, il faudra assurer la rentabilité de la cacaoculture pour ne pas que celle-ci cède sa place à d’autres cultures plus lucratives. Mieux payer les producteurs fait partie de la solution. 

Alors nous, que peut-on faire de notre côté? 

Comment peut-on aider la situation en tant que consommateur?

En encourageant la production durable de cacao alias une production de cacao qui se fait dans le respect de l’environnement et du travail des producteurs. De toute façon, le respect des autres et de la planète devrait être la norme, non? ❤️

Alia Dharssi, une journaliste de Vancouver, a interrogé plusieurs scientifiques afin de déterminer comment consommer du chocolat de manière durable. Résultat: il n’existe pas de solution unique.  

Voici 3 solutions proposées qui se pratiquent dès le moment de faire les courses. 

1. Acheter du chocolat certifié par un organisme crédible

Les compagnies peuvent bien identifier leur chocolat de « écolo » ou « éthique » si elles le veulent, mais seules les certifications nous garantissent une certaine surveillance des pratiques. 

FAIRTRADE

La certification Fairtrade (certifié équitable) travaille pour l’amélioration des conditions de travail des producteurs de cacao. Par exemple, ceux-ci doivent être payés à un salaire minimum Fairtrade (qui les protège si le marché chute) et reçoivent une prime supplémentaire si le cacao est biologique.

Des exemples de marques qui offrent des produits certifiés équitables sont le chocolat ou le cacao Camino et les chocolats Theobroma, Green & Black’s, Alter Eco et Galerie au chocolat. Trouvez le logo Fairtrade sur l’emballage pour vous assurer que le produit en question est certifié.

Logo Fairtrade
Logo Fairtrade (certifié équitable)
Chocolats équitables
Ces chocolats sont tous certifiés équitables

RAINFOREST ALLIANCE

La certification Rainforest alliance se concentre sur le support des fermiers et des communautés, la protection des terres et cours d’eau, et de l’amélioration des revenus pour les fermiers. Depuis 2018, elle est fusionnée avec la certification UTZ pour ne former que la Rainforest Alliance.

Selon mes observations, c’est davantage des produits contenant du chocolat que des barres de chocolat comme telles qui affichent cette certification (p. ex. les barres Clif, les barres glacées Magnum, les bouchées de chocolat noir au fruits Brookside).

Logo Rainforest Alliance
Logo Rainforest Alliance

Acheter du chocolat certifié est un bon départ, mais cette solution comporte ses limites. Par exemple, les producteurs certifié Fairtrade n’arriveraient pas à vendre toutes les récoltes comme telles et le gain monétaire d’être certifié ne serait pas énorme au final (plus ou moins 1% du revenu annuel). 

2. Choisir de consommer du chocolat noir

Selon Dietmar Stoian, un scientifique à Bioversity International, consommer du chocolat noir aiderait davantage les producteurs de cacao. En effet, un chocolat noir nécessite plus de cacao dans sa fabrication que les autres types de chocolat, ce qui signifie qu’une plus grande partie des profits liés à la vente retourne aux producteurs. Plus le pourcentage sur l’étiquette est élevé (p. ex. chocolat 70%), plus le chocolat contient de cacao! 

Pour les amateurs de chocolat noir, c’est une bonne nouvelle! 😀

❓ Saviez-vous que…

Le chocolat noir typique est sans produit laitier. Il existe quelques exceptions évidemment, mais un chocolat noir est habituellement fait de pâte de cacao, de beurre de cacao et de sucre. 

3. Encourager les chocolatiers bean-to-bar

Le bean-to-bar est un concept selon lequel le chocolatier fait affaire directement avec les producteurs de cacao pour se procurer sa matière première au lieu de passer par un intermédiaire. L’idée derrière cette pratique serait d’obtenir un chocolat de haute qualité et de s’assurer que le producteur de cacao reçoit un montant équitable pour son travail. Ce chocolat n’est pas toujours certifié, mais ça ne représente pas forcément une faiblesse selon Hamish Van Der Ven, un professeur à l’Université McGill. En effet, ce dernier pense que cette méthode pourrait être autant ou plus efficace qu’une certification. 

Exemples de chocolat bean-to-bar au Québec: 

*La boutique en ligne de la chocolaterie État de choc vend les produits Chocolats Monarque et Chaleur B.

Enfin, s’informer sur les compagnies et revendiquer des pratiques durables sont des façons de pousser encore plus loin votre dévouement à la cause! 

En résumé

Bien que nous ne devrions pas manquer de chocolat d’ici 2050, la producteur cacaoyère fait face à de nombreux défis: demande croissante, faible productivité et conditions de travail difficiles pour les agriculteurs.

En tant que consommateur, nous pouvons investir dans la production de chocolat en achetant du chocolat certifié (Fairtrade ou Rainforest alliance), en choisissant plus souvent du chocolat noir et en encourageant les chocolatiers bean-to-bar. 

Amélie Loiselle

Amélie 

Nutritionniste Dt.P. M.Sc.

Un gros merci à mes précieuses amies et collègues nutritionnistes qui ont relu ce texte. Leurs commentaires aident grandement à nourrir ma réflexion 🙏

Agence Science Presse (2018). Non, le chocolat ne disparaîtra pas en 2050https://www.sciencepresse.qc.ca/actualite/detecteur-rumeurs/2018/02/13/non-chocolat-ne-disparaitra-2050 


Andres, C., Comoé, H., Beerli, A., Schneider, M., Rist, S., & Jacobi, J. (2016). Cocoa in monoculture and dynamic agroforestry. In Sustainable agriculture reviews (pp. 121-153). Springer, Cham.


Dharssi, A. (2018), The Decider: 5 Ways to Choose Sustainable Chocolate. Asparagus magazine. https://medium.com/asparagus-magazine/5-ways-to-choose-sustainable-ethical-chocolate-cocoa-certification-e301e79726bb 


Fairtrade international. Cocoa. https://www.fairtrade.net/product/cocoa  


Opoku Gakpo, J. (2018). Rubber plantations are displacing Ghana’s small cocoa farms. Cornell Alliance for Science. https://allianceforscience.cornell.edu/blog/2018/03/rubber-plantations-displacing-ghanas-small-cocoa-farms/ 


Rainforest alliance (2016). Rainforest Alliance Certified Cocoa. https://www.rainforest-alliance.org/articles/rainforest-alliance-certified-cocoa  


World Cocoa FoundationFocus Areas – Human rights. https://www.worldcocoafoundation.org/focus-areas/human-rights/ 

Le témoignage de 3 artisans chocolatiers bean-to-bar dans Le Devoir: https://www.ledevoir.com/vivre/alimentation/522224/chocolat-de-la-feve-a-la-tablette 

Fèves de cacao: David Greenwood-Haigh de Pixabay 

Cabosse de cacao: Elias Shariff Falla Mardini de Pixabay 

Monoculture de maïs: WhiskerFlowers de Pixabay 

Potager (polyculture): congerdesign de Pixabay